Hélène Vacaresco

Hélène Vacaresco

Chant de guerre

Chant de guerre

 

Le vent gémit, le vent apporte

L'immense rumeur des combats!

Vois passer la noire cohorte,

Le sol tressaille sous ses pas.

L'air est rouge, les cieux livides

Sous le vol des corbeaux avides,

Venus là pour ronger les morts,

Et dans l'ardente chevauchée,

Ainsi qu'une moisson fauchée,

Tombent les braves et les forts!

 

Faut-il que pour eux seuls la gloire

Fasse frissonner l'étendard?

De leur radieuse  victoire

Ne veux-tu pas aussi ta part!

Après le coup qui les écrase,

Le coeur de triomphe rempli,

Ils tombent tous sans que rien souille

Leur armure qui craint la rouille,

Leur nom qui redoute l'oubli!

 

Sais-tu que vos pieds l'ont foulée,

La terre où dorment les aïeux,

Et que le bruit de la mêlée

A troublé leur sommeil pieux?

Et songeant aux vieilles alarmes,

Ils sont accoudés sur leurs armes,

Pour voir d'autres lauriers fleurir,

Pour voir, de leurs demeures sombres,

Si l'on songe à leurs grandes ombres,

Et si comme eux l'on sait mourir!

 

Chants d'Aurore, 1886



14/10/2012
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